OK ! BÔMEUSE (SS2)

La suite du journal d'une bobo au chômage. Lisez avant de juger.

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Par Lisa Delille
29 avr. · 3 mn à lire
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Épisode 7 - CelluHit

Cette semaine, je suis allée me faire épiler le maillot dans l'institut en bas de chez moi.

Passé la journée à m’arracher les cheveux sur mon roman (eh oui, faute de piges, j’ai décidé de me remettre dessus…). À seize heures, j’ai estimé que la séance de torture avait assez duré. J’ai chaussé mes New Balance (cinq-cent-soixante-quatorze) et suis sortie pour mon épilation du maillot chez CelluHit. Je pousse la porte de l’institut. Depuis la cabine du fond, Aurore carillonne qu’elle est à moi dans une minute. Je m’assois sur un pouf de velours rose pour détailler les mantras inscrits en italique au-dessus de la caisse : Le secret du bonheur est de faire ce que tu aimes. Le secret de la réussite est d’aimer ce que tu fais. Je les relis plusieurs fois pour essayer d’en exhumer un sens caché, une contrepèterie, un message crypté qui m’aurait échappé au-delà de l’évidence : je ne trouve pas. C’est officiel, aujourd’hui, je ne sers à rien.

Les beaux mantras d'Aurore. DR.Les beaux mantras d'Aurore. DR.

J’abandonne les mantras pour détailler le décor. Tout a changé depuis le dégât des eaux du mois d’octobre. Aurore a dû toucher un sacré pactole de l’assurance, elle. Je me lève pour aller inspecter les rayonnages sur-mesure. Je fais courir mes doigts sur la menuiserie laquée de blanc, me contorsionne pour admirer l’astucieux système d’éclairage intégré. Du travail de professionnel, à n’en pas douter. J’ouvre un pot de crème anti-âge Maria Galland. J’en hume le parfum, divin. Je dépose une noisette sur le dos de ma main. Je juge la texture convaincante. La voix chantante de mon esthéticienne me fait sursauter. Brésilien ou Américain ? Je me retourne et retrouve mon Aurore toute bronzée. Elle est radieuse. Je lui demande de me rappeler en quoi consiste le Brésilien (j’ai un doute, tout à coup). Ça dépend si on touche aux lèvres ou pas, m’oppose Aurore. J’ai un mouvement de recul. Grands dieux, toucher aux lèvres ? Bien sûr que non, on ne touche pas aux lèvres, quelle idée ! Aurore cligne des paupières pour me signifier qu’elle m’a comprise et m’escorte dans une cabine en roulant des hanches. Elle en ressort immédiatement, le temps pour elle d’aller encaisser sa cliente et pour moi de me déshabiller. J’ôte mes baskets, mon jean et ma culotte et prends place sur la table recouverte d’une bâche en papier. Aurore rouvre la porte en fredonnant (Aurore est la joie incarnée). Elle jette un œil rapide à mon entrejambe, me soupçonne d’avoir rasé. À chaque fois, j’ai droit à la remarque. Je balbutie que c’est ma pilosité qui est comme ça, j’ai le poil dru que voulez-vous (la vérité est que je n’avais pas les moyens de m’offrir ses services ces derniers mois). Aurore pose sa main sur ma cuisse : il n’y a pas de souci. Il n’y a jamais de souci avec Aurore, aucun problème chez CelluHit, c’est bien pour ça que je viens ici. La jeune femme s’arme d’une spatule qu’elle plonge dans la cire avant de venir me l’appliquer sur l’aine. Je crie. C’est brûlant. Aurore s’excuse en riant. Sa généreuse poitrine tressaute sous sa blouse immaculée. Elle replonge la spatule dans son appareil, la ressort, souffle dessus en retenant ses mèches caramel de l’autre main. Je la complimente sur sa frange rideau. Aurore glousse. Ça la change. C’est vrai que ça la change. Et c’est réussi, m’empressé-je d’ajouter. Aurore m’apprend qu’elle a profité de ses vacances pour sauter le pas. Je m’enquiers de la destination. Dubaï. Ah oui, son cousin travaille là-bas, ça me revient. Elle se faisait une joie d’y aller, on en avait longuement parlé la dernière fois. Visiblement, elle n’a pas été conquise par son séjour dans l’émirat. Trop fake. J’opine en mettant mes cuisses en grenouille comme elle me l’ordonne à présent. Aurore appose deux nouvelles bandes de cire rose de chaque côté de mes lèvres. Elle décolle la première du bout de son faux ongle strassé avant de l’arracher d’un coup sec. Cette fois, je ne moufte pas. Je me tiens tranquille. Ma belle tortionnaire en profite pour me demander si je suis en télétravail aujourd’hui. J’opine de nouveau. Jamais eu le courage de lui avouer que je touche les allocations chômage. Trop peur de la décevoir. J’aurais l’air de quoi, à côté de cette travailleuse acharnée ? Munie de sa pince à épiler, Aurore charcute mes poils incarnés. Elle est soulagée, elle vient de recruter une apprentie trois jours par semaine. Depuis la réouverture en janvier, CelluHit ne désemplit pas. Je suis contente pour elle. Malgré les apparences, j’ai le plus grand respect pour l’esprit d’entreprise. Aurore repose la pince pour retirer la dernière bande. Elle prévient : celle-là risque de faire mal. Schlak. Mais je ne sens rien, tout éblouie que je suis par les fausses tâches de rousseur qui mouchettent ses pommettes. Satisfaite, Aurore se cambre pour souffler voluptueusement sur mon sexe afin de calmer le feu. Mon clitoris se durcit sous cette brise inopinée. Je me redresse pour admirer le résultat. Du sang perle par endroits, du Malabar reste englué sur les touffes rescapées. Ce n’est pas un ticket de métro, c’est la bande de Gaza. Mais ça me va, tout me va à cet instant. Aurore s’enquiert de savoir si je souhaite faire le sillon inter-fessier. Bien entendu, je consens. Je me retourne docilement sur le ventre, maintiens mes fesses écartées afin d’accueillir sa spatule. Je dois préciser que c’est Aurore qui m’a fait franchir le cap de l’inter-fessier. Avant elle, personne n’y avait eu accès. En fait, c’est simple : aucun mec, aucun gynécologue, ne peut rivaliser avec Aurore s’agissant de la connaissance de mon intimité. En tartinant mon anus, Aurore me fait :

— Et sinon, vous êtes du quartier ?